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Les archives insolites du Département : les bateaux de bains sur la Seine

Cet article a plus d'un an et est à considérer comme une archive
©Archives Départementales de la Seine-Maritime

Du 22 février au 5 mars, les Archives départementales proposent chaque jour, hormis les week-ends, un sujet à la fois historique et insolite. Aujourd’hui : la Seine et ses « bateaux de bains » !

Bacs, péniches, grands voiliers : on trouve toutes sortes de bateaux sur la Seine. Naguère, on pouvait même y apercevoir des petits navires spécialisés en bains ! Pour en retrouver la trace, il faut d’abord revenir dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. À cette époque, les rivières constituent le seul lieu de baignade pour la majeure partie de la population. Il vaut mieux ne pas être pudique ou opter pour les rares espaces proposant des palissades afin de se soustraire à la vue des passants et de se laver en toute tranquillité.

Ce souci de quiétude et d’isolement donne des idées à certains. Et c’est d’une plume inspirée et nourrie de savants calculs qu’en 1762, l’architecte rouennais Louis Gilbert présente à la Municipalité et à l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Rouen un projet de bateau aménagé à l’usage de bains publics. Le projet reçoit un accueil chaleureux. Les édiles en sont persuadés : « cet établissement sera très utile, même nécessaire pour l’entretien de la santé des habitants ». Et c’est via de très officielles lettres en date du 9 avril 1763 que le roi autorise Louis Gilbert et Marie Adrienne Bioche, sa femme, à « establir sur la rivière de Seine devant la ville de Rouen et dans les endroits qui leur seront indiqués par les juges de police de laditte ville un ou plusieurs bateaux sur lesquels ils pourront establir des bains chauds ou naturels conformément au plan attaché auxdittes lettres…»

A l’époque, une corporation se réserve le droit de proposer des bains chauds : celle des barbiers étuvistes. Ce service est quasiment exclusif et relativement peu répandu dans les villes. La proposition de Louis Gilbert est d’autant plus originale et intéressante. Il transpose de manière limpide sa vision dans le plan très détaillé ci-dessous.

Description de l’aménagement : une pompe permet de faire monter l’eau du fleuve, un fourneau dans la cale chauffe une réserve d’eau. L’établissement est mixte mais hommes et femmes y disposent d’espaces bien distincts, chacun accédant même au bateau par une passerelle différente.

Dans les décennies suivantes, d’autres bateaux semblables ouvrent sur les quais, parfois voisins de bateaux lavoirs. Cette mode a contribué  au développement des bains publics, surtout à partir du XIXe siècle et dont les premiers sont apparus sur les quais de la Seine à Paris et à Rouen.

Sur le littoral, les bains de mer attirent la bourgeoisie parisienne, normande ou anglaise. Entre les deux rives de la Seine, le public des bateaux de bains est différent. C’est surtout la classe ouvrière qui s’y retrouve. Le cadre hygiéniste de ces bateaux ne tarde pas à déborder sur d’autres notions : le sport et l’amusement. Des écoles de natation, où l’on peut se baigner dans la Seine ou sur des locaux adaptés, vont être construites, distinctes des bains publics destinés aux soins corporels. Le plan ci-dessous expose un projet d’école de natation sur le Mont-Riboudet. Il date de l’année 1850 et n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de projets proposés par des Rouennais sur les quais ou les îles de la Seine.

Description de l’aménagement : Les bains froids de ce bateau sont destinés uniquement aux femmes. En 1850, que ce soit dans un fleuve ou à la plage, hommes et femmes se baignent séparément. Ici, l’école se compose d’un grand bassin situé au centre. Une trentaine de cabines l’entourent, utilisées pour revêtir sa tenue de bain à l’abri des regards indiscrets.