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Déchiffrer des lettres : les clos-masures

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Le clos-masure est une ferme traditionnelle du pays de Caux aux contours et à l’aménagement bien définis. Il représente un patrimoine exceptionnel que le Département cherche à faire reconnaître via une candidature sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.

Vus du ciel, avec leur forme de quadrilatère, les clos-masure peuvent faire penser à des livres aux couvertures multicolores qu’un géant aurait disséminés dans tout le pays de Caux. L’agencement typique de ces fermes obéit à quelques principes de base. Tout d’abord, elles sont entourées par des alignements d’arbres de haut-jet, dont le tronc peut parfois atteindre 30 mètres de haut. Ils sont plantés sur des talus, d’une hauteur moyenne de deux mètres. Cette configuration a plusieurs utilités : freiner le vent et tempérer le climat, diminuer les eaux de ruissellement, préserver la faune et la flore, fournir du bois et abriter les lieux des regards indiscrets.

Ensuite, dans la cour intérieure, se trouvent différents bâtiments : étable, écurie, grange, colombier, manège, four à pain, sans oublier bien sûr les maisons d’habitation. Celle du maître est bâtie en matériaux nobles et côtoie parfois celle du fermier, construite en bois, sans étage et couverte de chaume. Les bâtiments sont espacés entre eux, de manière à éviter les propagations d’incendies mais aussi de maladies.

Traditionnellement, un verger est placé dans la cour. Il se compose souvent de pommiers de haute-tige accompagnés ponctuellement de poiriers, pruniers ou cerisiers. Il sert à la production de cidre, une boisson consommée jadis de manière quotidienne dans bien des fermes. Une utilisation insolite de liquide a été faite et ce, durant les deux guerres mondiales. Les agriculteurs vendaient leurs alcools à l’État pour la fabrication d’explosifs !

Un clos-masure n’est pas complet sans la présence d’une ou de plusieurs mares. L’explication est simple : même si la pluie est abondante en Normandie, le sol sur les plateaux ne retient pas l’eau de manière naturelle. Les agriculteurs devaient donc créer des mares artificielles, bien moins onéreuses que la construction de puits. Elles servaient ainsi à l’alimentation, la cuisine, la vaisselle, la toilette mais aussi l’abreuvage des animaux et à l’arrosage du jardin potager. Elles constituaient par ailleurs des réserves d’eau en cas d’incendie.

Aujourd’hui cependant les clos-masures et le patrimoine qu’ils représentent sont menacés. L’urbanisation moderne, l’augmentation des réseaux routiers, les nouvelles normes écologiques et agricoles modifient en profondeur les paysages et avec eux, les fragiles clos-masures. C’est pour les préserver que le Département agit depuis maintenant une dizaine d’années et poursuit un objectif ambitieux : inscrire les clos-masures du pays de Caux au patrimoine mondial de l’Unesco.

Ainsi, durant tout ce temps, plusieurs étapes importantes ont été franchies : missions d’études du projet, d’inventaire des clos-masures et de réflexions sur les actions à entreprendre. De plus, le mois de mai a vu une nouvelle intervention de taille. Le Département a en effet officiellement remis un mémoire de soumission à la liste indicative des biens français. L’objectif de cette remise est de postuler via l’État dans quelques années auprès de l’Unesco. Avant d’y parvenir, il faudra toutefois attendre des conclusions favorables de la part des experts du Comité national des biens français qui examinent tout dossier porté à ce niveau.

En cas de succès auprès de l’Unesco, les bénéfices d’une candidature validée seraient inestimables dans bien des domaines : tourisme, environnement, économie et agriculture pour n’en citer qu’une poignée. Mais avant de sabrer le cidre, il faudra néanmoins s’armer de patience ; le cheminement d’une candidature n’est pas avare en écueils et surtout, se compte en années.