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La symbiose éco-responsable de l'agroforesterie

Publié : Il y a 1 mois
©Julien Paquin
Entre un monde de plus en plus urbanisé, et un métier, l’agriculture, devenu plus complexe, le fossé s’est creusé. Durant neuf jours, le Département s’installe au Salon International de l’Agriculture à Paris et en profite pour faire découvrir le quotidien de ceux qui chaque jour réinventent le travail de la terre. Aujourd’hui, c’est le système de l’agroforesterie qui est à l’honneur. Ancien et moderne à la fois, il est en usage à Grand-Couronne, sur une parcelle appartenant au Département.
 
Peu de gens le savent, mais au-delà de ses compétences principales, le Département assure aussi l’entretien et la gestion d’une partie des forêts seinomarines. Sur les 1 416 hectares de forêts départementales, il en gère directement 621, et le reste en indivision avec l’État. Pour citer quelques exemples, il a en charge les Bois de Fécamp et de la Ventelette, celui de Cordelleville à Clères, et le plus vaste, la forêt du Madrillet à Saint-Etienne-du-Rouvray, avec ses 315 hectares.  A Grand-Couronne, deux massifs forestiers sont gérés par la collectivité : le Bois des Pères et le site des Essarts. C’est à l’entrée de ce dernier, par un après-midi ensoleillé d’automne qu’Éric, agent départemental à la gestion des forêts et des parcs, évoque le travail effectué sur la quarantaine d’hectares du site et plus particulièrement à travers sa spécificité, sur la moitié de sa surface : l’agroforesterie. Cette pratique agroécologique associe arbres et cultures - ou animaux d’élevage - sur une même parcelle.  « C’est un système mixte reposant sur une symbiose et des bénéfices réciproques. Les services rendus sont multiples et s’inscrivent dans le contexte du changement climatique : accroissement de la biodiversité et amélioration de la qualité, la fertilité et la préservation des sols. De plus, tout dispositif arboré lutte contre l’érosion. Économiquement, c’est préférable aussi. Pour exemple, on diminue les intrants, onéreux et accusant de piètres bilans carbones et un revenu complémentaire est apporté par les arbres (vente des fruits, de bois énergie ou de bois d'œuvre…). Il y a aussi moins d’arrosage nécessaire en période de sécheresse grâce à une remontée en surface des eaux de profondeurs. » 
 
D’autres avantages sont à noter. Les arbres procurent à de nombreuses espèces sauvages des refuges et de l’alimentation, notamment à des « auxiliaires de culture ». Ces précieux alliés sont des espèces prédatrices de ravageurs. On y trouve des coccinelles pour lutter contre les pucerons ou des staphylins, coléoptères qui se nourrissent de limaces. Enfin, les araignées et les oiseaux contribuent aussi à cet équilibre naturel. Néanmoins, certains grands animaux peuvent aussi compliquer la tâche, même avec des gaines de protection anti-gibier mises en place. « Les chevreuils et surtout les sangliers, qui peuvent faire beaucoup de dégâts. Leur densité a explosé. Dans le passé, il y avait deux portées par an. Aujourd’hui cela peut aller jusqu’à trois ou quatre, avec six à dix petits à chaque fois. »
 
Acquis en 2006 par le Département et premier projet d’agroforesterie de cette envergure en Seine-Maritime, le site des Essarts est riche et diversifié, comme l’analyse Éric. « En terme de  boisement, on y trouve le robinier, un arbre épineux, souvent confondu avec l’acacia, le douglas, le chêne sessile, et le chêne pubescent plus résistant au réchauffement climatique, des châtaigniers et même des pommiers. » Pour aider Eric, une autre symbiose est de rigueur, celle avec un agriculteur. « Je travaille avec un exploitant agricole céréalier qui dispose d’un bail environnemental. Il bénéficie d’un dégrèvement de loyer en contrepartie de travaux d’entretiens et d’éducation des arbres . Par exemple, il va donner un coup de labour pour faire plonger les racines des arbres en profondeur. »
 
Si les agriculteurs ne voient pas toujours d’un bon œil l’agroforesterie, « il faut les comprendre, cela réduit les surfaces utiles agricoles », un constat historique leur parle cependant. « L’agroforesterie est très ancienne avec des traces de pratiques dès l’antiquité (mélange de vigne et d’oliviers). Son déclin remonte au XXe siècle en lien notamment avec la mécanisation. Sauf qu’au regard des contraintes environnementales des systèmes de productions intensives dans un contexte de dérèglement du climat, un retour de plusieurs siècles en arrière pourrait bien s’amorcer ! »
 
Ce procédé vertueux sur le plan environnemental n’est pas le seul encouragé par le Département. On peut citer aussi la création et la restauration de haies. Il propose des subventions aux collectivités et particuliers souhaitant se lancer dans des projets de ce type. Rappelons qu’une haie peut héberger jusqu’à 80 espèces d’oiseaux, 35 de mammifères 100 d’insectes, voire 14 de reptiles et de batraciens.